TANGANYIKA : L’étrange échange téléphonique entre Julie Ngungwa et Abiba Binti Masudi

C’est un étrange échange téléphonique qui fait le buzz depuis sa fuite sur les réseaux sociaux entre deux femmes : Julie Ngungwa Mwayuma, la gouverneure de la province du Tanganyika évincée du pouvoir après une motion de défiance le lundi 08 mai 2023 et Abiba Binti Masudi, une députée provinciale élue de Kalemie qui a participé au limogeage de la cheffe de l’Exécutif provinciale.  

« Je suis du parti au pouvoir UDPS, j’ai l’argent, je serai rétablie à mon poste » annonce comme avec par défi Julie Ngungwa alors que tout avait commencé dans le calme lorsque la gouverneure déchue appelle. Très vite la conversation téléphonique dégénère en pugilat de déballage avec un langage parfois qui dépasse le respect mutuel entre les deux interlocutrices qui ne se font pas de quartier. Et ce sont les méandres nauséabonds de la gouvernance de la province qui ressortent à l’air libre, avant que tout dérive finalement sur d’insoutenables attaques et propos tribales.

Morceaux choisis…

Attaques de Mwayuma : « J’ai payé vos dettes illégales »

« Tu vois, je vais revenir, mais je voulais d’abord prendre le temps pour mieux te connaître. Je suis très intelligente, tu vois ? J’ai ton dossier ici, mais vous avez été pressés de me déchoir en violant votre propre règlement d’ordre intérieur. Moi je prie mon Dieu, le vrai Dieu qui m’a mis là au Tanganyika », lance d’entrée Julie Ngungwa avec émotion dans la voix.

Et de dénoncer « Cette petite fille qui venait mendier chez moi, demandant chaque fois de l’argent, tantôt parce qu’elle est malade pour se faire soigner en France, tantôt pour autre chose. Vous me demandez l’argent, vous voulez m’asphyxier pour que la population dise que c’est moi la responsable de l’état de notre province ? J’ai payé vos dettes qui sont illégales, j’ai dit au vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur (Peter Kazadi Kankonde NDLR) que vous aviez des dettes qui datent depuis l’époque de Zoé (Kabila). Ils me demandent de payer des dettes qui sont illégales avant d’adopter le budget, je l’ai fait. Le président (de l’Assemblée provinciale) est venu chez moi et m’a demandé 100.000 dollars. Vous voulez que les trouve où ? Depuis que j’ai pris le pouvoir, je n’ai jamais reçu un seul financement du Gouvernement central. J’ai trouvé les recettes provinciales à 150.000 dollars par mois, je les aient montées à 500.000 dollars. Je me bats seule et mon bilan est positif. Vous voulez m’empêcher de poser des actes pour la province. Mais je vous assure que tout ce que j’ai sur le cœur va sortir ».

Réplique de Abiba Binti Masudi : « L’UDPS n’a aucun député ici… »

 « Arrête de tout déballer au téléphone, attends quand on va se voir, on n’en parlera » alors que Julie Ngungwa ne lui laisse pas le temps : « Je suis gouverneur de l’UDPS, parti au pouvoir. J’ai l’argent, je vais serai rétablie dans mon poste, je vais revenir ». Réponse immédiate de la députée : « Excellence, l’UDPS n’a aucun député ici. Tu dois avoir de bonnes relations avec les députés, sinon ils vont te renvoyer chez toi à Kinshasa. Nous allons te faire voir de quoi les enfants de Kalemie sont capables ». 

Riposte de Julie Ngungwa : « Cet argent que vous aimez tant, c’est ce que je vais amener ». Réaction de Abiba Binti Masudi : « Ce n’est pas ton argent, c’est l’argent de la province. Si on te réhabilite comme gouverneure, nous allons t’humilier plus qu’avant ». La gouverneur déchue qui n’en démord pas : « Je vais revenir la tête haute !» Et la députée, décidément folle de rage : « Si tu es une femme, reviens alors ! Tu apprendras que Kalemie à des enfants impolis !» Enfin, c’est une incroyable dérive tribale qui s’en suit, avec des propos méprisants pour les communautés d’origine des deux dames : les Bahemba et les Bawolowolo.

Pour rappel, la gouverneure du Tanganyika, Julie Ngungwa Mwayuma, a été déchue de ses fonctions par une motion de défiance votée par 14 députés sur 18 présents, lors d’une séance plénière lundi 08 mai 2023, dirigée par le président de cet organe délibérant, Vincent Kibombo Kakudji.  Plusieurs griefs à sa charge notamment la mauvaise gouvernance et détournements des deniers publics.