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RDC : le M23-RDF tente un rapprochement avec Twirwaneho pour étendre le conflit au Sud-Kivu

Selon Africa Intelligence,  le régime de Paul Kagame continue d'assurer un soutien militaire au M23 sur le sol congolais. C'est, en substance, les conclusions du dernier rapport du groupe d'experts des Nations unies sur la RDC, dont Africa Intelligence s'est procuré une copie.

Leurs auteurs ont poursuivi la documentation entreprise depuis l'an dernier sur la présence de la Rwanda Defence Force (RDF) aux côtés des rebelles dans la province congolaise du Nord-Kivu.

Les hommes de la RDF, dont la coordination des opérations est assurée sur le sol congolais par le brigadier général Andrew Nyamvumba, ont été localisés, entre novembre 2022 et mars 2023, dans les territoires de Rutshuru, de Masisi et de Nyiragongo. Ils y cohabitent parfois directement avec les combattants du M23, ce qu'atteste notamment un carnet retrouvé par les experts à Mushaki, une localité sous contrôle des rebelles.

Ce document détaille les noms et les grades des militaires rwandais envoyés en mission dans la zone, de même que l'emploi de mortiers contre les positions adverses.

Selon le rapport du groupe d'experts, ce soutien militaire est coordonné à Kigali par le conseiller défense et sécurité du président Paul Kagame, le
général James Kabarebe.

Depuis près de trois décennies, ce militaire de 64 ans fait figure d'homme lige du chef de l'Etat rwandais sur la situation sécuritaire dans l'est de la RDC.

Un dossier sur lequel il s'est fait la main en officiant comme chef d'état-major de l'armée congolaise sous la présidence de Laurent-Désiré Kabila.
Ce dernier s'était appuyé sur Kigali pour prendre le pouvoir, avant de se retourner contre son ancien allié.

Pour mener ces actions militaires sur le sol congolais, regroupées sous l'appellation "North Kivu Operations", Kabarebe s'appuie sur les plus hauts dirigeants de l'armée rwandaise, tous identifiés par les experts onusiens pour leur rôle direct dans le soutien au M23. On retrouve parmi eux le lieutenant général Mubarak Muganga, nommé début juin chef d'état-major de la défense (la plus haute fonction au sein de la RDF), ainsi que le général de division Vincent Nyakarundi, ex-patron du renseignement militaire nommé, lui aussi, début juin chef d'état-major de l'armée.

Sur le terrain, une forme de statu quo prédomine depuis quelques mois, les affrontements ayant drastiquement diminué à la suite de la pression
internationale exercée sur le régime rwandais et les rebelles.

Les hommes dirigés par le chef militaire du M23, le "général" Sultani Makenga, ont également essuyé un sérieux revers à la mi-mars dans leur tentative de prendre Saké, le dernier verrou pour l'encerclement complet de Goma, le chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Ils ont dû composer avec les frappes aériennes intenses menées par les Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC), soutenues par les hommes de la société Agemira RDC, accompagnés au sol par d'anciens éléments de la Légion étrangère française emmenés par Horatiu Potra.

Plutôt que de reprendre l'initiative, et sous la pression de l'East African Community (EAC), le M23 a préféré opérer un retrait en trompe-l'œil de certaines zones et localités occupées. Aux yeux des experts, tout comme de Kinshasa, cette période aura surtout permis aux rebelles de se renforcer, tout en multipliant les exactions contre les civils (meurtres, viols, extorsion et
travail forcé).

Le groupe d'experts des Nations unies a tenté de documenter leur puissance de feu, qui comprend plusieurs types de fusils d'assaut, mitrailleuses, lance-roquettes, lance-grenades et mortiers. Certains équipements ne proviennent pas des cachettes d'armes disséminées dans la région lors des affrontements de 2012, leur production étant largement postérieure. Plusieurs d'entre eux ont été produits en 2020 ou 2021, laissant donc en suspens la question de leur provenance.

Le M23 s'est également renforcé en hommes : le nombre de combattants est désormais estimé à 3 000, grâce à l'arrivée de nouvelles recrues formées sur le site d'entraînement de Tshanzu. Selon les experts, on retrouve parmi eux les soldats de Baudoin Ngaruye Wa Myamuro - un responsable de premier plan du M23 lors des affrontements de 2012 -, qui avaient trouvé refuge jusqu'à une date récente au Rwanda voisin.

Extension du Conflit au Sud-Kivu 

Les experts onusiens s'inquiètent des velléités des rebelles du M23 d'étendre le conflit jusqu'à la province voisine du Sud-Kivu où est prévu le déploiement des drones chinois de combat CH-4 sur l'aéroport militaire de Kavumu. Ils ont constaté des tentatives de rapprochement avec les Twirwaneho, un groupe d'autodéfense de la communauté banyamulenge établi sur les hauts plateaux du Sud-Kivu, qui s'est mué en groupe armé et se finance grâce à l'aide apportée par la diaspora banyamulenge, en particulier celle implantée aux Etats-Unis.

Le rapprochement opérationnel entre les deux entités demeure toutefois limité, bien que de jeunes recrues banyamulenge soient parties combattre pour le M23 en passant par la ville de Bunagana, frontalière avec l'Ouganda, ou la ville ougandaise de Kisoro, proche de la RDC.

La frange des Twirwaneho emmenée par le colonel déserteur des FARDC Michel Rukunda, dit "Makanika", est tiraillée par des divisions internes sur l'attitude à adopter face au conflit.

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