Kabare : Des femmes déplacées en quête de survie à Cirunga
A Kabare, depuis plusieurs mois, des affrontements sporadiques entre groupes armés et milices locales ont semé la panique. Des dizaines de familles ont fui vers des localités plus sûres comme Cirunga centre, Mudaka ou même à Cikera et Ciriri à Bukavu.
Pourtant, à peine mises à l’abri, beaucoup de femmes retournent clandestinement à Cirunga à la recherche des denrées alimentaires. Pour ces femmes, le retour temporaire n’est pas un simple caprice, mais une nécessité.
« Nous n’avons pas le choix. Là où nous sommes réfugiées, nous manquons de tout. Ici au village, il y a au moins l’eau du puits, quelques maniocs que nous avions semés. Nous revenons, nous vérifions la maison, nous ramassons ce que nous pouvons », confie une mère de cinq enfants.
Ces allers retours sont souvent organisés en petits groupes. Les femmes partent à l’aube, discrètes, après s’être assurées que la route est relativement dégagée. Elles traversent des sentiers boisés où tout peut arriver : racket, violences, enlèvements. Pourtant, elles continuent. Pour protéger un toit, un champ, quelques ustensiles, parfois quelques chèvres ou poules encore en vie.
Des maisons comme dernières balises
« Nos maisons, c’est tout ce qui nous reste. Même si le toit est troué, même si les portes ont été emportées, tant que nous pouvons y poser la tête un jour, nous avons encore quelque chose », murmure une veuve depuis trois ans.
Par ces visites, elles espèrent décourager les pillards ou les occupants illégitimes. Dans certaines zones rurales du Sud-Kivu, l’abandon total d’une maison est perçu comme une invitation pour d’autres de s’y installer : « Si nous arrêtons de venir, nous perdrons tout. Et où irons-nous après ? » S’interroge-t-elle.
Mais ces visites ont un coût psychologique lourd. Chaque retour est une épreuve. Il faut être sur ses gardes. Des femmes racontent avoir dû fuir précipitamment après avoir entendu des coups de feu ou croisé des hommes armés. Certaines, traumatisées, préfèrent ne plus revenir, laissant cette mission aux plus jeunes ou aux voisins.
« La peur est là, tous les jours. Mais que faire ? Nous n’avons pas de travail en ville, pas de champs là-bas. Ici, même en insécurité, c’est chez nous », explique une autre femme.
Une absence criante de solutions
Ces femmes réclament une aide qu’elles ne voient pas venir. Dans certains villages voisins, quelques ONG distribuent des vivres. Mais à Cirunga, beaucoup estiment être oubliées. « Nous n’avons pas vu un seul camion d’aide ici. Tout le monde a peur de venir à cause des combats. Et nous, nous souffrons en silence », déplorent-elle.
Les déplacés s’entassent souvent chez des proches, dans des conditions insalubres, augmentant les risques de maladies et de violences domestiques.
Malgré tout, ces femmes continuent de rêver d’un retour définitif.