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RDC : Honoré Ngbanda Nzangbo Ko Atumba, un an après son décès

Il y a un an jour pour jour qu’Honoré Ngbanda Nzambo Ko Atumba dit Honoré Atu, 75 ans ; mourait à Agadir au Maroc où il vivait en exil depuis des années. Un mois après cette disparition, il fut officiellement inhumé le vendredi 30 avril 2021 en stricte intimité familiale dans les cimetières de Champigny-Sur-Marne en banlieue parisienne en France.

Président fondateur de l’Alliance des Patriotes pour la Refondation du Congo (Apareco) dont il était la figure tutélaire, Honoré Ngbanda a légué aujourd’hui un mouvement écartelé entre son ex-secrétaire de cabinet et l’une de vice-présidente nationale Mme Candide Okeke d’un côté, et la majorité des cadres de l’autre qui revendiquent l’autorité et la direction du mouvement.

Une situation d’un avenir incertain qui a fini par être tranchée en faveur des cadres par le tribunal de Créteil où les deux parties s’étaient retrouvées devant le juge.  « La disparition d’Honoré Ngbanda laisse non seulement notre mouvement politique plus qu’orphelin d’un père, mais de tout tellement qu’il était l’incarnation personnifiée et le leader incontesté ; les autres membres du Comité national n’étant que des collaborateurs figurants » nous expliquait déjà sous anonymat un proche du défunt.

Le 1er anniversaire de la disparition d’Honoré Ngbanda a été l’occasion pour le nouveau comité sous la présidence de Mr Alphonse Ebama Djoko d’organiser une cérémonie en mémoire de son illustre prédécesseur le 21 mars 2022.

L’un des vice-présidents n José Yango W’Etshiko écrit sur son mur Facebook : « Du 21 mars 2021 au 21 mars 2022, nous commémorons l’An 1 de sa disparition physique mais spirituellement, il demeure en nous et avec nous pour continuer son combat. Autant qu’un pasteur connait une à une toutes ses brebis, autant notre regretté PN d’heureuse mémoire connaissait tant ses vrais compagnons de lutte de la résistance pour la libération de la RDC que les opportunistes de la 25ème heure et aussi ses détracteurs patentés qui clament après sa mort être devenus comme par la magie des héritiers de son combat. Ils veulent réécrire l’Histoire de la résistance à leur manière oubliant ou ignorant que l’Histoire n’accepte jamais le compromis, la correction, le travestissement et l’enterrement de la vérité initiale ».

Son inhumation en France s’explique aussi par le fait qu’il aura résidé un temps dans ce pays et spécialement dans la commune de Champigny-Sur-Marne avant de rejoindre le Maroc. Mais aussi qu’une partie de sa famille, notamment ses enfants devenus français par naturalisation y vivent encore depuis leur départ du pays avec la chute du régime du Maréchal Mobutu en 1997 dont leur père fut un grand serviteur.

Une page tournée et un avenir incertain…

Avec la mort d’Honoré Atu, c’est une page de l’histoire du Congo-Zaïre qui se tourne avec le règne de feu Maréchal Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga dont il fut l’un des collaborateurs le mieux écouté. Mais c’est aussi la fin d’une autre histoire de cette opposition de l’extérieur du pays aux régimes qui se sont succédés à Kinshasa depuis 1997 jusqu’à ce jour dont il incarnait la « résistance » au travers de son Alliance des Patriotes pour la Refondation du Congo (Apareco).

Entouré d’un petit cercle de fidèles organisés et déterminés, Ngbanda aura continué de propager de son vivant « ses théories du complot » contre la RDC via les réseaux sociaux. De Laurent-Désiré Kabila à Félix Tshisekedi en passant par Joseph Kabila qu’il a présenté comme un « rwandais », il ne s’était accommodé avec personne jusqu’à son dernier souffle ; radicalisant de plus en plus son discours contre les régimes successifs de Kinshasa au point de friser carrément la paranoïa en qualifiant tout le monde de mèche avec les occupants.

Comme dans une fidélité jusqu’à la mort par un pacte de sang, Honoré Atu avait choisi par hasard de tirer sa révérence au Maroc où est mort et enterré son mentor, le maréchal Mobutu. Avec sa mort se posait déjà la question de savoir bien si son mouvement d’Apareco lui survivra ; tellement il en était l’incarnation au quotidien en même temps l’autorité morale.

Alors qu’il n’était même pas encore inhumé, des graves dissensions sont apparu au sein du Comité national avec la contestation des cadres contre la présidente ad intérim désignée par eux Mme Candide Okeke. Une situation qui n’augurait pas un avenir serein pour le mouvement politique dont Honoré Ngbanda aura consacré les dernières années de sa vie.

En sa qualité du dernier survivant, avec la mort de Ngbanda qui fut ministre de la Défense nationale au moment depuis un an s’est également éteint un dossier, celui de la tragédie des 16 février et 1er mars 1992 avec le massacre dans les rues de Kinshasa des chrétiens qui réclamaient la réouverture de la Conférence Nationale Souveraine (CNS) brutalement fermée par son premier ministre de l’époque, feu Jean de Dieu Nguz Karl i Bond. Ngbanda ayant toujours nié sa responsabilité dans cette affaire.

L’ancien président de la République du Zaïre Mobutu Sese Seko, le ministre de l’Intérieur Tony Carbure Mandungu Bula Nyati, le gouverneur de Kinshasa Kibabu Madiata Nzau étant tous morts. Il en est de même des organisateurs de ladite marche le Dr François Kandolo et Pierre Lumbi Okongo ; tous deux membres du comité de la Coordination Laïque de Kinshasa.

Un homme d’exception ?

De l’homme de confiance de Mobutu dont le parcours terrestre s’est arrêté le 21 mars 2021, l’on retiendra qu’il fut de tous les combats pour le maintien de la dictature de Mobutu : ex-chef des renseignements, ancien ambassadeur en Israël (1983-1985) et ministre de la Défense (1990-1992) ; Ngbanda fut également à d’innombrables reprises Conseiller spécial en matière de sécurité du même Mobutu dont certains rumeurs non vérifiés disaient qu’ils étaient oncle et neveu.

Responsable de l’Agence Nationale de Documentation (AND) entre 1985 et 1990, aujourd’hui l’Agence nationale des Renseignements (ANR) de triste mémoire, ce poste sécuritaire lui a valu même le surnom de « Terminator » du fait de la froideur dans la répression de ses services face aux velléités de contestation du régime dans le pays.

Né le 5 mai 1946 à Lisala dans l’ancienne province unifiée de l’Equateur comme Mobutu dont on dit qu’ils étaient oncle et neveu, le chrétien Honoré Atu fut l’un de ceux qui auront entêté le dictateur jusqu’à la fin brutale de son régime après 32 ans d’une règne de terreur.

Ayant vécu en exil au lendemain de la chute par sa fuite du pays de Mobutu en 1997 sous les boutoirs des petits hommes chaussés des bottes de caoutchouc de Laurent-Désiré Kabila, Nganda était visible par le Togo de feu Gnassingbé Eyadema Togo et le Gabon d’Omar Bongo Ondimba ; deux pays dont il aurait même détenu un passeport diplomatique en un moment avant de se retrouver en France avec un passage à Abidjan, du temps de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo. De ses multiples présences dans les capitales africaines, Ngbanda disait mener des « activités de conseil auprès de chefs d’État du continent ».

N’étant pas parvenu à obtenir le statut de réfugié politique au pays des Droits de l’Homme et sous la menace d’une reconduction aux frontières, il quittera la France pour un lieu tenu « secret » mais dont tout le monde savait que c’était le Maroc où vit la famille de Mobutu. Pour justifier sa situation de clandestinité quasi permanente, Ngbanda expliquait à qui voulait l’entendre que « sa vie est mise à prix par les puissances étrangères qui occupent mon pays ».

A l’avènement de Félix Tshisekedi et la décrispation politique créée avec les retours au pays des opposants Jean-Pierre bemba et Moïse Katumbi, on avait également cru en son retour ; une hypothèse qu’il avait carrément démentie en accusant le nouveau régime : « le contact téléphonique sollicité par François Beya avait plutôt pour but de le piéger, dans l’unique but de torpiller le combat de la Résistance en diffusant des fausses nouvelles annonçant son retour au pays, alors les conspirateurs ont manqué leur cible ! Car nous sommes en mesure de diffuser l’enregistrement intégral de cet entretien téléphonique de 3 minutes 49 secondes ». Un enregistrement dont on n’aura rien su jusqu’à son décès !

L’analyste politique Joseph Emmanuel Bunduki Kabeya donnait déjà cet avis-conseil : « Autant de questions que l’Apareco devra affronter en interne pour espérer survivre, s’il y arrive et c’est ce qu’on lui souhaite ; c’est d’entrer dans une opposition constructive qui aide les Congolais à résoudre leurs problèmes quotidiens et que l’on sorte de la dualité « collabo/ non collabo » qui n’aide en rien au développement harmonieux de la RDCongo. C’est, comme le disaient les Romains que du choc des idées que jaillit la lumière ; personne ne possède un savoir infus. La contribution de chacun est un pas de plus vers ce Congo prospère et développé que tout le monde réclame ».

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