Dans la souffrance est cachée, avec une intensité extrême, la force ascensionnelle du Monde. Toute la question est de la libérer, en lui donnant la conscience de ce qu'elle signifie et de ce qu'elle peut.(Père Xavier Bugeme sj)
Mes chers Paroissiens, chers frères et sœurs,
Paix !
Je vous envoie la méditation pour ce vendredi de la 5ème semaine TO Impaire B
Lecture Gn 3, 1-6
Ps 31
Évangile Mc 7, 31-37
En cette année où nous parlons beaucoup de la nouvelle évangélisation, tous les déplacements de Jésus, notamment en territoire païen ainsi que les miracles qu'il y accomplit sont d'une extrême importance.
En ce qui concerne l'évangile d'aujourd'hui, remarquons que Jésus agit sur ce pauvre homme, parce que d'autres personnes le lui ont amené. Ces personnes ne peuvent rien faire par elles-mêmes, mais elles connaissent Jésus. Elles savent qu'il peut guérir, sauver et libérer. Alors elles provoquent la rencontre avec Jésus. Et que fait Jésus ?
Il ne rejette personne, bien au contraire il prend l'homme à l'écart comme une rencontre privée, comme pour un cœur à cœur, et il le guérit. Dès lors ces personnes iront elles aussi partager ce grand trésor de l'amour de Dieu.
Nous vivons dans un monde où il y a de plus en plus d'incroyants. Même dans l'Église, beaucoup ont perdu la foi. Ce texte nous montre le chemin de l'évangélisation. Celle-ci ne consiste pas tant à chercher des nouvelles méthodes pour partager et enseigner une doctrine, qu'elle consiste à conduire les gens vers le Christ, à provoquer cette rencontre où Dieu pouvant parler à leur cœur, les oreilles s'ouvriront, les langues se délieront ! N'oublions que nous ne pouvons rien par nous-mêmes, que c'est Jésus qui est le Seigneur et Sauveur.
Pour nous accompagner dans notre prière, je vous suggère cette réflexion du Père Thibault-Marie Ruelle (www.cath.ch)
Bonne méditation à toutes et à tous. (Père Xavier Bugeme sj).
L’être humain est un être de la parole ; elle est le fondement de notre communication. Ne plus entendre, c’est être mis à l’écart de la sphère des échanges interpersonnels et donc hors de la sphère humaine. De tristes expériences ont été faites avec des bébés, où personne ne devait leur adresser la parole. Résultat au bout de quelques semaines, ils se laissaient mourir en refusant de s’alimenter.
Dieu parle et nous n’entendons pas
Vous allez me dire : « ouf » heureusement pour moi, je ne suis pas sourd. En es-tu si sûr ? Car l’évangile de ce dimanche est là pour nous rappeler que nous sommes tous, plus ou moins sourd (ou en tous cas malentendant). Pourquoi ? Parce que Dieu nous parle et nous ne l’écoutons pas.
Voilà hélas la triste situation de notre humanité pécheresse ; le péché nous a affecté dans nos sens spirituels : nous n’entendons plus Dieu. Spirituellement sourds, nous nous replions sur nous-mêmes, emmurés dans notre solitude, incapables de communiquer, ni avec Dieu, ni avec les autres.
Nous perdons une perception décisive
Le pape Benoît XVI, dans une homélie en 2006, nous invitait à lire ce passage de l’évangile dans ce sens :
« Il n’existe pas seulement la surdité physique, qui isole l’homme en grande partie de la vie sociale. Il existe également un affaiblissement de la capacité auditive à l’égard de Dieu, dont nous souffrons particulièrement à notre époque. Tout simplement, nous n’arrivons plus à l’entendre – trop de fréquences différentes parasitent nos oreilles… Avec l’affaiblissement de la capacité auditive ou même la surdité à l’égard de Dieu, nous perdons également notre capacité de parler avec lui ou de lui. De cette façon, nous perdons une perception décisive. Nos sens intérieurs courent le danger de s’éteindre. Avec la disparition de cette perception, l’étendue de notre rapport avec la réalité en général est également limitée de façon drastique et dangereuse. L’horizon de notre vie se réduit de façon préoccupante. »
La compassion de Jésus
La Bonne Nouvelle pour nous aujourd’hui frères et sœurs, c’est que Jésus vient nous guérir de cette surdité afin de nous restaurer dans notre dignité de fils et de filles de Dieu son Père.
Jésus se rend en « territoire de la Décapole », c’est-à-dire sur la rive est du lac de Galilée, en terre païenne. « On lui amène un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler » : sans doute les habitants de la région avaient entendu parler des miracles qu’accomplissait Jésus. Pourtant, très curieusement, ils ne demandent pas à Jésus qu’il le guérisse, mais qu’il lui impose les mains.
Mais Jésus devant la souffrance des hommes, quel qu’elle soit, est toujours saisi de compassion. Il va donc non seulement guérir cet homme de sa surdité physique, mais il va aussi lui rendre toute sa dignité humaine et sociale.
Jésus met ses doigts dans ses oreilles, il touche sa langue avec sa salive, et les yeux levés au ciel, il soupire et lui dit : « Effata ! », c’est-à-dire : « Ouvre-toi ! »
Ces gestes de Jésus ont de quoi choquer notre sensibilité moderne, notre souci d’hygiène, sauf en communauté bien sûr où on partage tout, même les microbes. En tous cas Jésus n’a peur du handicap, ni des lépreux, ni de s’approcher des malades, Bien au contraire…
Une parole efficace
A travers ces gestes, Jésus ne fait que reproduire des usages de la médecine de l’époque : un contact physique localisé sur l’endroit de la maladie : les oreilles et la salive, source présumée de vie, proche de la parole. Par contre, à la différence des médecins de son époque, c’est qu’avec Jésus ça fonctionne. Sa parole est efficace, l’effet est instantané : « ses oreilles s’ouvrirent ; sa langue se délia, et il parlait correctement ».
Jésus, le divin potier vient réparer sa créature. Lui, le Verbe créateur du Père, par ces deux gestes accompagnés de cette parole : « Effata », vient restaurer sa créature, la rétablir dans sa beauté originelle. Jésus est venu pour faire une création nouvelle.
Il est beau aussi de voir que Jésus soupire, ce qui n’est pas sans nous rappeler le souffle créateur de l’Esprit Saint qui vient nous donner la vie même de Dieu.
Frères et sœurs, cette parole « Effata » que le Christ prononce sur le sourd-muet en touchant ses oreilles et sa langue est une parole efficace pour chacun d’entre nous. Comme il ouvre les oreilles du sourd, le Christ vient ouvrir nos oreilles à l’Esprit Saint pour que nous entrions dans l’intelligence de sa Parole. Et comme il délie la langue du muet pour le rendre capable de parler, il nous donne de pouvoir proclamer notre foi avec assurance.
L’Eglise a toujours été très sensible à cet épisode qui exprime si bien la compassion du Seigneur pour nous ; c’est sans doute pour cela qu’elle a introduit le rite de l’«Effata » dans la liturgie du baptême où le prêtre en touchant les oreilles et la bouche du baptisé dit : « Effata, ouvre-toi ! Le Seigneur Jésus a fait entendre les sourds et parler les muets ; qu’il te donne d’écouter sa Parole et de proclamer la foi pour la louange et la gloire de Dieu le Père. »
Des humains ouverts à Dieu et aux autres
Qui ouvrira notre cœur et notre bouche si nous sommes devenus sourds et muets ?
Dieu seul peut ouvrir nos bouches et délier nos langues. Car Il veut que nous devenions des témoins de la foi.
Aujourd’hui encore, le Seigneur veut que nous soyons des hommes et des femmes ouverts à Dieu et aux autres ; dont les oreilles soient capables d’entendre sa Parole, pour l’accueillir comme l’écrit St Paul, « pour ce qu’elle est réellement : non pas une parole d’hommes, mais la parole de Dieu qui est à l’œuvre en nous, les croyants » (1 Th 2, 13).
Le Seigneur veut que notre langue soit déliée, pour que nous ne restions pas muets, mais pour que nous Lui parlions, par notre louange et notre prière ; et aussi pour que nous proclamions Sa Parole avec assurance.
Frères et sœurs, sommes-nous dans cette attitude d’écoute et de disponibilité active, où sommes-nous plutôt comme le sourd-muet de l’Evangile ?
Où que nous en soyons, nous avons tous besoin d’être touché par Jésus. Qu’il nous délivre de nos enfermements et qu’il nous ouvre à la richesse de sa Parole, afin de pouvoir en témoigner autour de nous.
Réflexion recueillie et proposée par le Père Xavier Bugeme sj
Curé de la Paroisse Christ Roi de Mangobo à Kisangani.